Edito de novembre 2017
L’édito d’Anne
Le 23 novembre 1993 , APJ écrit : « je continue de brûler les « paperoles » de ma vie pour n’en garder que quelques unes à transmettre »
(NB : « paperole s » mot de Marc Soriano)
Aujourd’hui, je recueille ce qui n’a pas brûlé, bouquet d’émotions plurielles, de fille, de femme, de mère et grand-mère, de professionnelle qui a tant entendu et rencontré de mots… Je retrouve les échos de ce qu’elle me disait et qui s’est inscrit assurément, confusément, intensément, prêt à se transmettre un jour, à s’incarner, à s’envoler, à se diversifier, à prendre sens….
Ces « paperoles », ce « rien ou si peu » … elle écrit ensuite qu’il fut son « équilibre, son balancier, son ouverture aux autres », « une intense rencontre avec les mots ».
Parmi elles, je partage avec vous ces (ses) mots d’automne :
« Toussaint.
Je mets des bouquets de chrysanthèmes dans ma maison. Le chrysanthème est devenu une fleur d’automne. Pour Maman, elle s’y refusait. Tous étaient pour les morts du cimetière…Excepté la rangée « des morts entrés dans l’oubli » : elle avait fait leur sanctuaire là.
Elle pouvait prendre quelques branches mais ne pas les démunir : elle les avait recueillis (au cimetière , elle fleurissait les tombes oubliées). Quand elle est morte j’ai bouturé ses « sauvages » qui fleurissent aux intentions de Maman.
Maman avait un jardin d’automne superbe .Elle avait des buissons de chrysanthèmes et d’autres qu’elle pinçait, dirigeant les sèves sur 5, 7, 9 têtes, ou 3 parfois. Il fallait un nombre impair ! je ne sais plus pour quelle raison. Chaque potée était destinée à un mort dans son coin de cimetière. Dans le coin libre, ils étaient à offrir ou « au cas où »…
Interminable bordure de chrysanthèmes laissés sauvages (juste dédoublés au printemps), pour « les morts un temps entrés dans l’oubli ».
( …)
« Des chrysanthèmes. Leur incroyable coiffure ne cesse de m’enchanter. Je dessine ici deux coeurs de chrysanthèmes de cette Toussaint ensoleillée et le détail de la coquetterie d’une boucle superbe, or et bronze.
J’aime leurs couleurs à la fois intenses et profondes, leurs calmes têtes à peine décoiffées au vent d’automne, leur raideur digne dans la chute des feuilles. Le jardin se défait de toutes parts. C’est leur heure de gloire : Ils sont rois.
Maman regrettait que le français les ait mis au masculin. Au patois de chez nous elles étaient au féminin.prenait une tête dans ses paumes et lui disait : ce français est fou ! coiffée comme tu es, ma Elle belle ! ».
Toussaint est ensoleillée cette année encore et le jardin se défait , fidèle, de toutes parts. J’assiste à son envol vers le sol, entre bleu, or, orange et rouge.
« En regardant mes feux de paperoles qui semblent immolées, comme moutons noirs, à quelques unes que je garde, je sais qu’il n’y a pas sacrifice mais renaissance. Elles reviendront autrement et par d’autres, elles ne sont qu’ensemencements qui se réensemencent depuis la nuit des temps »
(Novembre 2001)
Merci.
Le 15 novembre, l’Association sera encore une fois à StAvit, au Club des anciens de St Avit et Ratières pour un partage de lectures autour du contes.
J’y lirai des extraits d’un manuscrit inédit « une enfance contée » et d’autres textes inédits tirés de ses mémoires (Anne Des Collines) ou de sa correspondance.
Le rendez-vous est de 14 à 17 H à la Bibliothèque Anne Pierjean-Robert. ouvert à tous.
Nous y resterons au chaud et nous partagerons les souvenirs des mémées et pépés conteurs de son enfance… ainsi qu’un goûter !
A bientôt