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Edito de novembre 24

… Et, l’automne fut ! (pour faire le lien avec l’édito d’octobre !)
Il est !
Tout de brume en ce 1er novembre.
Il avance, paré de ses habits de lumière d’été de la saint Martin, notre « été indien », aussi surprenant, splendide que royal chaque année.

Novembre… moi qui fus résolument contre, au point de le boycotter l’an dernier, je me surprends à en guetter les caprices avec un sourire amusé… pas vraiment les apprécier mais plaisanter de ses semelles d’argile qui collent déjà aux pieds et de ses foucades,  rasades imprévisibles de  moments de soleil  cru et chaud contrastés de  quelques aperçus de grisaille et bourrasques…. 

Cette grisaille en pointillés, juste avant qu’elle s’installe trop fort, elle m’attendrit un peu .

C’est vrai que je traîne les pieds à rentrer les plantes « qui craignent», je leur accorde un sursis…
C’est vrai que les châtaignes, c’est cool dans les sous-bois encore ensoleillés, entre les  marbrures mouvantes de vent et de douceur… C’est vrai que les cafés et les lectures se prolongent encore sur les terrasses et sous les parasols… et que j’ai encore plaisir à pédaler ou marcher entre les averses plutôt douces.
C’est vrai que l’approche de la Toussaint est riante , aux allées enfleuries et rangées des cimetières amis…
C’est vrai que la douceur est bonne à prendre et qu’on en fait provision… tant que les vitrines ne parlent qu’ en orange halloween et citrouilles goguenardes, nous épargnant encore  givre, neige, rennes au nez rouge, boules dorées et marrons glacés!
C’est vrai que les kakis sont savoureux, translucides et gorgés de la lumière d’octobre.

                                                                              *

Côté vie associative, j’ai pu contribuer, le 3 octobre, à une rencontre  à Allex autour du thème « Les enfants durant la guerre ».  Ce temps offert par l’association Mémoires d’Allex regroupait les anciens et les enfants du village. Je l’ai introduit par la lecture d’extraits de « Le temps de Julie ». 

Un moment riche de désir de transmission, de partage et de croisement de questions et de mémoires vives. Un moment de dialogue entre générations et de conscience des dangers qui guettent.

Le 21 octobre, je me suis rendue à Valence, toujours au titre de l’association Anne Pierjean, à une formation Bafa destinée aux animateurs de Centre aérés et colonies : ma contribution était d’animer un atelier pour les étudiants, autour de la littérature jeunesse  et à partir de livres d’Anne Pierjean. Un atelier  que j’ai étayé par  ses écrits, fouillés, à propos du rôle et des responsabilités de l’auteur jeunesse.

D’abord enseignante, Anne Pierjean  a souvent contribué à une réflexion approfondie sur la littérature jeunesse, par des écrits dans des revues pédagogiques, par des articles en réponses à des questions d’enseignants, bibliothécaires ou classes qui  « travaillaient» sur ses livres,  par des lettres ouvertes qui témoignaient de sa conscience aiguë des responsabilités des  adultes vis à vis des enfants. 

Elle avait foi en l’enfance, éternellement émerveillée par les compétences des enfants … 

Elle répétait : surtout ne pas « gâcher » leur ouverture au monde, leur curiosité, leur enthousiasme et leur faim d’apprendre, étayer leurs possibilités d’aller vers l’autre, contribuer pleinement et consciemment à la culture par des écrits de qualité, « à leur hauteur».

En réponse à un question, elle écrivait une lettre ouverte, parue en 1972 sur une revue de l’édition Magnard:
Une longue réflexion sur « le rôle et les responsabilités de l’auteur jeunesse » dans laquelle elle  résumait son « credo » : 

« Ne pas risquer de « gâcher » les capacités de curiosité, de poésie, d’apprentissages tous azimuts des enfants.
Ne pas risquer de les décourager de lire.
Ce ne serait pas prétentieux de dire que la littérature jeunesse contribue à la formation de l’enfant, l’ouvre ou peut l’ouvrir à la Culture, à vivre dans la société… » .

Et basait tout sur l’idée d’une rencontre avec l’enfant.

Depuis plusieurs années, je me trouve invitée à transmettre quelque chose de ce désir qui l’animait de porter haut la littérature  jeunesse… 

D’autres projets se profilent à discuter en équipe (réunion prévue le 6 novembre pour recentrer nos objectifs ) : des contes à lire, ou à conter grâce à des conteurs qui s’en « empareraient » ou avec lesquels nous pourrions « faire équipe »  en maison de retraite, chez l’habitant ou dans des lieux dédiés… 

c’est un peu délicat de trouver des lieux ouverts et de garder le feu de dire, de « passer »  les mots, pourtant il me semble que ce n’est jamais superflu … 

La bibliothèque de St Avit nous invite à lire « Saute-Caruche », des extraits bien sûr, suivis d’une soupe partagée, en janvier prochain. 

Ce livre particulièrement, pourquoi ?  Car ce personnage est bien ancré à St Avit, le village où il se découvre tardivement des aïeux après une vie un peu désinvolte de « sans famille »… un personnage débonnaire et haut en couleurs, accoutumé à être « sans racines » et simplement heureux, au jour le jour, car accepté et accueilli par le village…  Jusqu’au jour  où le maire lui fait d’inimaginables révélations qui vont gaillardement changer sa façon de voir la vie … jusqu’à sa façon de « carucher » …
( en 4ème de couverture : « …et Romain se trouve bouté hors des rails qui ratatinaient sa vie. (…)

Un livre sur le bonheur et la joie de vivre, dans un petit village français d’autrefois, un grand roman d’amour et de tendresse ») 

Les caruches, ce sont les mottes de terre dans les champs après labour… la démarche de Romain le caractérise au point qu’il est baptisé Saute-caruche…

« Qu’est-ce qu’il lui voulait le Maire ? (…) t’as qu’à aller voir !(…) Saute-caruche y alla de cette démarche légèrement cahotée, qui élançait le talon comme pour un saut, et puis le pied retombait en pas ordinaire, mais l’épaule poursuivait et accusait la lancée d’un bref soubresaut. On aurait dit -tiens!- qu’il traversait un labour hérissé d’énormes mottes -des caruches, quoi!- qui vous font marcher à tous petits bonds, comme les chasseurs ou les gens pressés qui tirent tout droit d’une ferme à l’autre, sans suivre les routes. »

Je ne résiste pas à poursuivre la lecture et la description délicieuse :

« Au début du siècle  -c’était en 1910-  les routes de nos campagnes n’étaient pas encore au pas des remembrements et elles serpentaient aux endroits qu’on leur laissait, contournant avec respect chaque coin des champs, musardant en boucles, bouclées, rebouclées. Le plus court chemin entre deux fermes voisines n’était; certes, pas la route.
Naturellement, au temps des récoltes, on les suivait, les chemins.

Seulement, pour les labours, c’était différent : un champ labouré, ça se traversait à saute-caruches —mais Romain Breton, labour pas labour, avait toujours l’air… Bref Saute-Caruche même sur les routes plates. »

Bonnes lectures
Et pensez à exprimer vos idées de diffusions de l’œuvre d’Anne Pierjean!

Mémo : Prochain Rendez-vous de La Bastelle le 23 novembre, à 18 H

Edito d’Octobre 24

File file l’été entre les doigts de septembre, filent filent les nuages qui s’entrechoquent et se répandent, octobre approche en ordre convenu : aux premières pluies, les crocus jaunes et les cyclamens sauvages dans le pré, aux premiers soirs frais, le repli heureux devant une flambée, les crêpes aux pommes et aux noix, caramélisées, puis, comme chaque année, les  photos rousses et les émerveillements -par Facebook interposé- de surprendre la parade amoureuse du cerf dans les montagnes du Vercors … 

« Julien est dans le bois qui mène à Malatra. Il cherche les empreintes, les branches froissées, les buissons arrondis en nids »…(« Des ennuis Julien ? »)

Les souvenirs s’égrènent sur les flancs de ces montagnes là, les feuilles rougissent sur les bords de ce jardin-là, les  noisettes sont ramassées, je n’ai pas croisé l’écureuil mais des mulots dans mes placards !… 

« Le 22 septembre aujourd’hui, je m’en fous… », Brassens m’accompagne ironiquement alors que je glisse mes pieds dans les premières feuilles mortes  !

Que chanteront les journées d’octobre ?

« Le pré est frais et mou sous ses pieds. Des troupeaux pâturent au loin dans les cliquetis des  sonnailles. L’écho renchérit de partout. Toute la montagne chante » (« Des ennuis Julien ? »)

La rentrée s’est faite, incrédule et légère, suivie du Forum des associations, le 7 septembre… pour la septième année pour notre asso, déjà… Des passants et des passantes devant le stand, quelques curiosités exprimées pour l’atmosphère qui s’en dégage, des dialogues nostalgiques et doux, quelques livres achetés, quelques souvenirs échangés… rien de plus… La vie qui va…

Cahin-caha, l’automne s’avance… succession de vents, de froid et de chaleur crue… celle de l’arrière saison, qui ne trompe pas, qui fait chercher l’abri et s’asseoir sur les murets bien exposés… brumes humides des matins de vendange et chaleur des midis, parfums et couleurs ravivés après les aplats de l’été…

Chaque année glisse ses pas dans ceux des précédentes.

Rien de nouveau… Et pourtant, l’étonnement des recommencements, le plaisir de renouer les mailles du temps. 

« Joie longue de la longue mémoire » (Galaure… dans « Si je regarde par-dessus l’épaule de ma vie »)

Des projets pour l’association se nourrissent de rencontres, de partages impromptus et de discussions aux coins des rues : l’écriture d’Anne Pierjean s’inscrit dans la durée  et irrigue des nervures imprévisibles, vers quoi ? vers où ? … Mes pas dans les siens, mes mots dans les siens, j’accompagne un chemin inattendu qui, je le sens bien, « se fait en marchant » …

Il se précisera, je le sais, d’ idées de traverse et de simplicités heureuses partagées. 

« l’âme d’Hélène habite une peuplaie… c’est comme ça, une évidence. Elle est souffle, air sans poids, et tout vibre autour d’elle »
(…)
 » Les mots ne sont qu’ombre portée.
Le soleil est dans l’épousailles des rencontres, il attend les rameaux qui ravivent les braises.  »
(« Si je regarde par -dessus l’épaule de ma vie… », p.67 et p.49)

Le retrait progressif des sèves de l’été invite à laisser l’enfouissement des graines faire son oeuvre , agir en presque immobilité, dormir, rêver… accueillir le pas à pas des jours, ouvrir les parenthèses… 

Que l’automne soit !

(27 septembre 2024)

 

Edito de septembre 24

La caresse des cigales s’est estompée et la rentrée s’annonce très précisément, pour tous …

Dans les starting-blocks, on pense peut-être à ce qui clôturera, ici, la première semaine de classe : le Forum des associations de Crest, le 7 septembre, scansion traditionnelle dans ce tout début de trimestre.

Nous y participerons comme chaque année avec un stand où se vendront des livres  «collector » d’Anne Pierjean: de belles occasions pour les fans de l’auteure drômoise et les collectionneurs!

En effet, ROUGE et OR est devenu une valeur sûre (non pas surannée ! bien que ses illustrations soient véritablement vintage -et recherchées pour cela- avec ses collections SPIRALE et DAUPHINE), comme les livres édités par MAGNARD…

Je libère mes étagères et offre ainsi des occasions « tendances » de compléter le rayon Anne Pierjean de votre bibliothèque !

Comme chaque année, les visiteurs trouveront sur le stand des évocations de l’auteure, des images, un panorama de son oeuvre, conséquente, il faut le rappeler : une douzaine d’albums pour les plus petits, 32 romans jeunesse ( parmi lesquels 7 titres ont été réédités en raison de leurs succès) à lire du CP aux classes de Collège… et bien au-delà.

Les titres dits « pour ado » (Paul et Louise, Loïse en sabots, Saute-caruche, Les trois louis d’or de Maria, Le rosier blanc d’Aurélie,  Le temps de Julie, Jean de Bise…et j’en passe ) sont maintenant très appréciés par les adultes qui les découvrent. 

Le temps conserve l’ écriture d’Anne Pierjean  sensible, poétique, juste, profonde et totalement actuelle car l’auteure a choisi de ciseler l’humain, de nourrir sa langue -unique, très personnelle- des émotions que tous partagent, et d’aborder des sujets qui demeurent cruciaux, la différence, l’eau, la campagne, les banlieues, la nature, les liens entre humains, l’école, les guerres, l’Histoire et les histoires mêlées…

Marc Sorriano, écrivain, philosophe et critique littéraire, misait sur la plume d’Anne Pierjean dans son guide de la littérature jeunesse  (en 1975) et l’a suivie dans son évolution avec confiance.

Nous exposerons également ses livres « pour adultes » : L’instant exact et La sente terminière, tous deux édités chez Gaspard Nocturne, en 2002 et 2011 (l’un posthume, l’autre pas), que l’on peut encore se procurer chez l’éditeur.

Le tout dernier « Si je regarde par-dessus l’épaule de ma vie», recueil tiré de ses blocs-notes , lettres et manuscrits inédits, édité en 2021 et réédité en 2023, sera en vente (15 €).

Bien sûr, le Forum est un espace, une occasion et un temps privilégié pour découvrir l’auteure et l’association qui poursuit la diffusion de son oeuvre, pour discuter, parler d’elle, de son écriture, feuilleter ses livres, le book de son chemin d’auteur, s’informer sur les projets de l’association, adhérer pour la soutenir, participer à sa vie, proposer des échanges et des projets à prolonger dans l’année à venir, s’engager à plus si le désir s’en mêle !

Nous nous y préparons donc avec grand plaisir comme à une rencontre essentielle.

En regroupant les livres d’occasion, j’ai retrouvé, encore, des exemplaires dédicacés par l’auteur, d’autres corrigés de sa main directement dans le texte en perspective d’une ré-édition, parfois annotés de considérations personnelles ou littéraires. 

Émotion et joie de la ressentir entre les lignes, de retrouver (à travers les ratures et ré-écritures incessantes) les traces de sa ferveur d’écrire et de son exigence du mot exact, du rythme de la phrase, de la cadence du texte…

                                                                      *      *      *

Se relancer pour la rentrée a aussi nécessité de renoncer à un événement prévu pour fin septembre : il le fallait pour le préparer mieux ! La Farandole des mots d’Anne Pierjean est repoussée en 2025,  au printemps.
Le temps de l’organiser mieux, plus ample, plus fidèle, plus exigeante et précise pour évoquer  l’ensemble de l’oeuvre de l’auteure dans la joie, la couleur et la profusion.

Dans notre actualité, il y aura cependant :

Une lecture à Livron, dont j’attends les détails : organisée par l’atelier Passeurs de mots, avec des textes tirés de « Un épouvantail pour Cathie et Marc ».
A préciser donc ! surveillez le site et Face book pour les annonces !

Et la reprise de nos rendez-vous de la Bastelle, le 27 septembre à 18H au siège de l’association, maison d’Anne Pierjean : 47, avenue Agirond à Crest. 

Inutile de s’inscrire, venez librement et partagez vos lectures-coups de coeur de l’auteure.

le 21 *chiffre habituel de notre rencontre bimestrielle coïncidant cette année avec la Fête locale, la St Férréol, et les journées du patrimoine… je ménage un autre espace dans l’agenda local pour que tous soient dispos pour y participer!

J’invite ceux qui ne connaissent pas encore ces moments de rencontre (de partage de textes aimés et de convivialité)  à venir pour les découvrir : 

avec ou sans texte à lire (on peut aimer écouter, simplement!), sans engagement, 

juste pour le plaisir de parler un peu la même langue, celle d’Anne Pierjean et de partager le verre de l’amitié à la fin ! 

* 21 gr, il paraît que c’est le poids de l’âme !

Je tiens à saluer et à relayer l’annonce d’une lecture de Claudine Delaine,  le 19 septembre à 20H,  à la Chapelle des Cordeliers : Des mots d’ailleurs  « La lumière et le papillon » , textes variés d’auteurs qu’elle a choisis.
Elle lira pour l’association nouvelle  « Au bord des mots ». 

Bon septembre et à bientôt !

PS :  Je souhaite à tous les écoliers, demain,  une école ronde « comme une bouche qui récite,
comme le O de joie,
comme la ronde qui ne casse pas
si les mains se tiennent bien »
 (In L’école ronde, Rouge et Or, collection Dauphine, Mai 1976)

Attention ! Mise à jour importante : Nous « rattraperons » le Rendez-vous de La Bastelle le 30 septembre  .
A 18 H à La Bastelle, 47, avenue Agirond à Crest 

ça a été un peu compliqué de trouver une date en laissant passer les journées du patrimoine, la Fête de la St Férréol et autres réjouissances locales !

En Novembre, nous reviendrons au 21 !

Edito d’Août 24

Dans le creux de la chaleur étouffante, j’ai des pensées de fraîcheur, de Vercors, de ressourcement… les envies de rivière sont contre-balancées par les efforts à faire pour s’en approcher ! la maison refuge, les contes et les musiques alentours pour traverser l’été, le souffle en suspens… 

L’arrivée d’Août ?  Inmanquablement, cela me ramène à Loïse, jeune mariée qui attend son premier enfant dans « tous ces bruits de guerre … Les paroles du Kaiser, les discours de Poincaré et l’angoisse qui montait et qu’on retrouvait partout, aux foires, aux marchés, dès qu’on était trois ou quatre à se rencontrer, ça allait les mener où? ».

(…) « La journée du 2 août fut plus lourde encore.
Le tocsin sonna sur les blés qu’on moissonnait et tous les jeunes partirent, abandonnant les moissons et les travaux de l’été qui battaient leur plein.
Et Loïse sut qu’elle portait en elle deux petits enfants.

La sage-femme venue —Louise était si énorme et si fatiguée!— pensait ne pas se tromper : deux coeurs vigoureux battaient, elle en était presque sûre. Deux coeurs de garçons ?

Loïse écrivit à Gilles qu’il aurait —sans doute quelques temps avant Noêl— deux petits garçons. Et que cela le rendait encore plus précieux si c’était possible. Gilles, veille bien sur toi…
Gilles répondait qu’elle veille sur elle et sur leurs petits.
Il ne disait pas qu’il était sous la mitraille, mais il écrivait du front et l’on savait bien ce que cela voulait dire.

Tout le monde se taisait après chaque lettre pour garder chacun son angoisse transportable, et ne pas faire un béton avec l’angoisse de tous.
Il ne fallait pas penser.
Il fallait se réjouir des lettres.
Ne pas s’embrouiller et bien séparer la Joie de la Peine, l’une traînant l’autre pour pouvoir aller le jour.
Il fallait, surtout, inscrire l’espoir comme certitude au bout de chaque geste qui épuisaient les journées faites de travaux trop durs qui n’en finissaient jamais.
Mais Sylvère restait là, dispensé de guerre, réformé à cause de ses fractures mal redressées qui handicapaient sa marche. Et Génie et lui travaillaient comme deux hommes sans entendre leur fatigue.
Loïse vaquait aux travaux de la maison, de la basse-cour. Et elle faisait ses petits. »

Je  ne peux lire la suite sans larmes…

« 1914 et 1915… 1917, 1918… Jacquou et Polo allaient sur quatre ans.
Loïse, Génie, Sylvère aidaient la Bourrue à attendre Gilles et à espérer la fin de la guerre qui saignait  à blanc toute la campagne.

Le garde passait, un crêpe de deuil au ruban de sa casquette, frappant d’une porte à l’autre, là où la mort l’envoyait.

Des fermes en deuil et des femmes veuves et des terres amputées, leur pérennité tranchée.
Les enfants jouaient quand même, mais avec ce quelque chose qui sape et qui fragilise à n’aller jamais jusqu’au bout du rire, jusqu’au bout du cri, du caprice ou du jeu, le frein toujours mis… Et les sourires des mères tout en demi-teintes, leurs angoisses filigranes… et la peur du garde, et la mort  — ce loup garou qu’on avait démuselé, avec qui on devait vivre et comme attentif à ne pas se signaler et se faire repérer soi et sa maison, sage, sage, sage.

Et les mon-père-du-front qu’on embrassait en vitesse sur des photos froides…
Et les mères exténuées. »

Cette guerre dont nous portons le fardeau, inscrit dans nos gènes, et qui demeure horriblement présente, rappelée chaque jour par les actualités qui semblent, elles, dépourvues de conscience vive …
L’art d’Anne Pierjean d’avoir su transcrire pour nous ce que nos mémoires savent confusément, indistinctement, douloureusement… 

Edito de juillet

Juin a passé comme dans un souffle, à guetter les éclaircies et l’arrivée de l’été.
Nous y voilà !
Juin s’achève, la St Pierre se prépare, ici à Crest, avec sa fête aux aulx et ses manèges en grand… 

Le 30 devait accueillir la lecture au jardin du conte « des yeux bleu barbeau » mais, élections obligent, l’annulation s’est imposée.
Elle se reprogrammera plus tard.

Un passage en Drôme des collines pour préparer la journée du 6 juillet m’a subjuguée de blés mûrs, prêts à moissonner, et de lavandes intensément bleues, encadrées de champs vert cru. Un paysage que je n’attendais pas, empêtrée dans les giboulées tardives, grêles, coups de vent et autres tracas viraux.

La ferme de la Gourrue était belle dans la creux de la plaine, entre ses champs étals… Des émotions multiples m’ont saisie, pile au rendez-vous dans les ondulations de l’air chaud sur la route… Du village à la garenne, en direction de la Galaure, le glissement de la voiture était propice au retour des souvenirs … les tombereaux et jardinières d’antan cahotaient dans ma tête, à l’arrière texte, réveillant des parfums fantômes de moissons, et la sensation fugace de cligner des yeux pour traverser le scintillement des brins de paille en suspension dans l’air … Cet après-midi là, le trop plein de chaleur éteignait un peu le soleil, comme un voile impalpable, et l’enfance revenait en vagues douces.

Samedi 6 juillet : La bibliothèque de St Avit nous offre le bonheur d’une journée entièrement dédiée à Anne Pierjean et son oeuvre.Une journée offerte en 4 temps :

Dès 9H30, rendez-vous à la bibliothèque pour ceux qui souhaitent faire la balade du matin :

Balade contée, accompagnée par Marie, Anne, Jean-Pierre et deux musiciens. Un circuit dans des lieux évoqués par Anne Pierjean au fil de ses écrits, ponctué de pauses lectures et musique entre village et rivière.
(L’esplanade de l’église, le cimetière, la Vermeille, la Font du roux et la place du village)

Repas à 12 H 15, tiré du sac, sous les barnums de la bibliothèque. Les organisateurs offrent Boissons et desserts !

A partir de 14 H, Croisements de lectures : échanges de lectures entre enfants de St Avit et lectrices de l’atelier « Passeurs de mots » de l’Association « Anne Pierjean, les mots et le jardin » .
Les textes seront variés, tirés de « une enfance contée », « Nane, les grand-pères et le voleur », « Paul et Louise »  et  « Un épouvantail pour Catie et Marc »

En final, à 16 H : lecture à trois voix d’extraits de « Si je regarde par-dessus l’épaule de ma vie ». 

Grand Merci aux bénévoles de la bibliothèque qui ont lancé cette belle initiative et aux musiciens qui nous accompagneront toute la journée.

Nous espérons que des familles viendront avec leurs enfants, car les lectures toucheront tous les âges.

A très bientôt pour fêter Juillet , St Avit et les mots !

Edito de juin 2024

Juin où tout bascule vers l’été après l’émerveillement de Mai aux rosiers, iris et autres réjouissances éclaboussantes.
Que nous réserveront les prochaines moissons ?

Un écho de « des ennuis Julien » dans la tête, j’irai sans doute, plus tard, du côté des blés de La Gourrue avec Paul et Louise, aux abords de l’été, partager le repas des moissons.

Julien a des ennuis : « … le mois de juin, qu’on attend toute l’année comme le prélude des vacances, s’annonce sous de drôles de couleurs pour julien.

Le mois de juin. Le dernier mois de l’année scolaire. Un mois plein de fraises et de cerises, où l’on prends son parti de tout en rêvant à la mer ou à la montagne proches. Déjà l’air est doux et a un air de vacances. »
«(…) Pour Julien cette année, juin commence mal. (…)

Je t’envoie chez ta soeur. Tu y resteras tout le mois de juin (…) tu seras bien là-haut pour reprendre des couleurs ».

Là-haut c’est l ‘Echaillon… où julien va rencontrer d’autres ennuis… mais où il va, aussi, vivre d’étonnantes découvertes :

« C’est curieux! au-dessus d’eux (…) un ronflement léger et sourd en même temps, fait de …? Fait de minuscules battements d’ailes dans le soleil ! De minuscules ailes où dansent des points bruns.

Une sorte de voile de gaze se déchire, se reforme, tournoie, s’échevelle, se rassemble, se ventile.

– Des abeilles ?
– C’est ça. un essaim d’abeilles
– On dirait qu’il veut se poser.
– Rentrons  dit Julien. On va se faire piquer.

 Mais Guy demeure figé et Julien reste là aussi. C’est trop beau. Et c’est haut encore.
– Ne bougez pas ! ordonne soudain Mathieu d’une voix basse et nette.
(…) Il n’explique pas, il agit.
Du perron, le doigt sur le tuyau d’arrosage, il provoque une pluie au-dessus du vol tournoyant.
Le vol devient dense dans un nuage de gouttes fines qui explosent dans le soleil. Violet-indigo-bleu (..) le vol tourne dans un arc-en-ciel. Et cet arc-en-ciel le rassemble, avance, recule, monte, descend, suivant ses propres mouvements, l’enferme, ne le laisse pas s’éloigner.

– Il faut que l’essaim se pose Ne bougez pas, vous le feriez fuir.
C’est encore Mathieu. Ils sont un peu aspergés mais ils ne bougent pas. Désobéir à Mathieu, qui y songerait?
Il est aux commandes de quelque chose qui appartient à la montagne , à sa vie, à sa terre, ses plantes, ses bêtes. Il est Mathieu, qui a la force et les secrets.

Le vol descend. Il bruit maintenant , les ailes lourdes d’eau. Un bruissement dense et léger tout à la fois. La pluie le cerne et le domine et l’accompagne. Fine, pulvérisée, mais implacable aux ailes, elle l’oblige à descendre encore, à se poser.

Le vol tourne devant les deux garçons, très proches maintenant.
– Ne bougez pas, répète lentement Mathieu, ne vous agitez pas. Rien. Vous ne craignez rien.

Quelques abeilles tournent autour des cheveux de Julien.
N’était le regard de Mathieu…
Mathieu a senti la panique.
Il lui explique doucement, pour qu’il comprenne, et le croie, et ne vienne pas tout gâcher :

– Ne bouge pas Julien. Une abeille qui essaime ne pique presque jamais. Elles n’ont qu’un but : ne pas perdre la reine. et la reine n’a qu’un but en ce moment : chercher un point d’appui pour former son essaim.

Sous le regard ferme de Mathieu, Julien sait qu’il ne bougera pas. Il ne dérangera pas cette étrange minute où Mathieu commande aux abeilles, dût-il cent fois être piqué !

Dans le vol tournoyant, un point devient plus dense et tournoie dans le tournoiement. Il semble chercher quelque chose. C’est le cercle autour de la reine.

– La reine ira sur la grosse branche du chêne. La branche morte, dit Mathieu.
(…)
– Celle qui avance comme un bras tendu au-dessus du pré. La reine s’accrochera là pour que les abeilles aient la place de former la grappe sous elle. Et aussi parce que ce coin est à l’abri du vent.

Et  la reine, en effet, se pose sur la branche morte.
Une à une, les première abeilles s’accrochent, forment un tout. Les autres tournent, se rapprochent et se suspendent à leur tour. Lentement, en ordre, l’une après l’autre.

– (..) l’essaim sera long à former

Julien pense encore : « et s’il repartait, la pluie arrêtée? »
– Non, dit Mathieu, la reine s’est assurée de la nourriture. Elle a vu l’eau du bassin, les acacias et les tilleuls en fleurs. Regardez, quelques abeilles viennent boire . Elles savent qu’elles vont rester là.

C’est vrai, les abeilles semblent paisibles, organisées, aucune ne s’affole.
(…)
…Mathieu ne dit plus rien. (…)
dans ses yeux passe une joie grave. »

A le lire et le relire, il me semble que ce livre aborde un sujet rare dans la littérature jeunesse, en tous cas à l’époque où il a été écrit : celui des ombres de la dépression,  chez un enfant,  du doute de soi, mais aussi la confrontation à l’autre, à un idéal… le  dépassement de la peur, grâce à l’appui des autres. 

Dans l’ actualité de l’association :  de nombreux contacts heureux, autour de la mémoire de notre patrimoine, des oeuvres et des personnages, des rites et traditions, des contes.

Et se préparent les lectures de la saison !

Le 30 juin, une première lecture dans le jardin de la maison d’Anne Pierjean : « Des yeux bleu barbeaux » (Les barbeaux ce sont les bleuets!) :
un récit aux allures de conte, bien à sa place aux alentours des fêtes de la St jean.
Lu à deux voix, par Claudine Delaine et Anne Grangeon.
 A 18 H, à La Bastelle, 47, avenue Agirond, participation libre et verre de l’amitié !

Le 6 juillet, Il y aura une lecture-balade à St Avit, en Drôme des Collines, organisée par la bibliothèque Anne Pierjean-Robert qui nous invite à lire et partager :
balade-lectures-musiques dès 9H30. RDV à la Bibliothèque.
Puis repas (tiré dus ac) ensemble, dans le jardin  de la bibliothèque,  L’après-midi se poursuivra par le croisement de voix de lecteurs de St Avit et de Crest (atelier Passeurs de mots) autour des textes d’Anne Pierjean, et se terminera par la présentation du livre « Si je regarde par-dessus l’épaule de ma vie » (lecture d’extraits par Anne, Claudine et Jean-Pierre).

A bientôt
Bonnes lectures

 

Edito de Mai 2024

J’aime la profusion d’avril même si elle éreinte au jardin !… l’herbe qui s’exalte haut et dru, les massifs qui en disparaissent, la glycine géante qui embaume et s’épétale tout de suite en épais tapis, les couleurs vives des tulipes qu’il faut dégager de l’envahissement des herbes sauvages, la démesure qui émerveille, le vert cru du pré en fond de déclinaisons tendres, chaque arbre, chaque plant dépliant sa nuance… pointillisme du printemps qui éclabousse et réveille, éclats d’être … mars qui passe le relai à avril.

J’aime cette folle démesure qui chaque année reprend les rênes et nous emporte, exaltés et renouvelés, en direction de l’été… écervelés aussi …car la démesure est aussi bien dans le  froid, chaque année surprenant et chaque année rappelé aux noms de tous les saints (de glace) et « chevaliers du froid » mêlés… chaque année, la fantaisie oubliée et déconcertante  du froid qui menace, on l’oublie !

Quand les premières chaleurs se trouvent brutalement démenties par les menaces de gelées, les galopades du vent, glacé et hautain, excessif en tout… cette démesure-là qui alerte, fige, déçoit, dément les prémices de joie, piétine l’enthousiasme au jardin, scelle cru les promesses de pousse, les renvoie, les annihile… ce versant là, ce printemps double-face, on a une ferveur tenace à l’oublier ! nous l’effaçons avec candeur et sincérité de nos souvenirs et semblons le redécouvrir chaque année ! étrangeté rebelle de notre mémoire sélective !

C’est pourtant bien de cette étoffe là que le printemps est fait, de démesures contrastées. Les anciens le savaient dont les dictons nous font parfois sourire… « avril, ne te découvre pas d’un fil… »

Alors, vivement mai ? … « en mai fais ce qui te plaît »… en oubliant ostensiblement le passage des cavaliers tardifs qui vont aussi peut-être encore tenter de nous rafraîchir la mémoire… ?… « C’est après le 13 mai qu’il faut planter… » ( le 14 mai , « le bon St Boniface entre en brisant la glace »).

Joyeusetés contradictoires du printemps ! (et confusions des saints et cavaliers si l’on consulte diverses littératures ! d’ailleurs, ils ont, paraît-il, changé de noms!)

Des nouvelles de l’asso, en arrière-texte de ces turbulences ? Petits travaux divers, de mises à jour informatiques en réflexions sur les textes, de contacts suivis en préparations de lectures… pour être honnête : une période un peu trop calme en créativité, plutôt riche en mises à jours et jardinages intempestifs ! 

Cependant, les projets lancés suivent leur route.

Le prochain rendez-vous de La Bastelle sera le 21 mai. Nous aurons beaucoup à échanger  ! A partir de 18 H à La Bastelle.

Trouvé dans Jean de Bise, cette évocation du printemps : 

« 6 mars 1774.
Six mars. Le printemps se devinait  aux premières nivéoles cueillies aux pentes des bois entre des flaques de neige.
(…)
– Le printemps bientôt! observa Gaspard passant près du presbytère.

– Et il s’avère nécessaire ! L’hiver fut très froid après un été trop sec. Le printemps peut-être améliorera les choses. Mes vieux os s’en réjouissent.

-le printemps me plaît aussi déclara Gaspard. Mais je file au plus vite. Le travail m’attend (…)
(…)

Malgré la neige encore là, en plaques éparses dans les creux de la terre et aux versants nord des murs et des arbres, le curé s’assit sur le banc de pierre près de sa porte cochère.
Le printemps ouvrait toujours une ère nouvelle aux travaux des champs et à la vie du village et (…) il se mit à repenser à ces dernières années. 

Il voyait surtout la petite alouette (Thilda) que sa soeur et lui avaient élevée depuis le décès de sa grand-mère.(…). Que de chemin parcouru depuis ses seize ans où elle chansonnait les garçons sur les chemins et où Jean de Bise enjambait ses palissades! 

Chacun avait pris sa route pour parachever son adolescence.
Et le curé aimait bien contempler leurs vies en marche vers ce mariage qu’il célèbrerait (…)
(…)

Mathilda brodait chez les dames Valfont.
Elle y broderait jusqu’aux épousailles.
(…)

-Quoi ? demanda vivement Thilda
-Eh! … comment expliquer ces choses ?
Qui pourrait bien exprimer ce vif-argent, ce soleil, cet arpège, ce feu follet qu’était Mathilda ? Quel terme pourrait être la fois ce qu’il désigne et son contraire ? Un rire les yeux en larmes? Une chanson de sanglots ? Des mots grondant de silence ou bien des silences grondant de paroles ? Et que tout cela soit vécu pour lui, par lui, avec lui jusqu’à ce que lui, Jean de Bise le taiseux, comprenne l’incompréhensible.
Alors, il résuma tout du mieux qu’il le put :
– tu es… tout ce que je désire.

Elle était, à chaque fois, mieux qu’il n’avait espéré.
Elle était une surprise sans cesse renouvelée.
Et il attendait le jour du printemps qui les marierait, comme la fagotée dans l’âtre attend qu’on batte briquet pour flamber de toutes parts.
Pouvait-on décrire une flamme vive ?
(…)

Et le printemps vint avec les violettes et les primevères, les bourgeons et les oiseaux pépiant dans la lumière, les murailles tièdes où coller le dos pour sentir la pierre croire déjà au soleil.

Et le mariage de Thilda et de Jean de Bise arriva le même jour dans tout cet éveil.
(…) »

Les pages qui suivent sont un trésor de littérature … à lire, absolument !
Elles décrivent la fête de mariage au village, les chants des  « bûcherons accroupis en rond autour d’un feu rallumé « .
-T’as pas oublié nos chants ?
-Non, dit Jean de Bise. Comment oublier ce qui fait partie de l’âme? »

et bien au-delà… , 
« la liesse villageoise spontanément accordée au bonheur des mariés» …

Puis, dans les paroles de Diane de Charvis, l’évocation d’une époque de révolution qui se profile,
« Je viens de comprendre votre force obscure… C’est une puissance invincible… s’il vous plait,  chantez encore. Un chant de labour, de sueur, de peine (…) Dédiez-le aux mariés, comme un cadeau rare : il est issu d’un passé de misère ramassée… (…)

« des personnes influentes se préoccupent de votre destin. Vous n’êtes plus seuls, oubliés dans vos collines (…)
mais chantez d’abord ce que vos pères chantèrent… »

… Et Jean de Bise fut le dernier livre jeunesse publié par Anne Pierjean.
Trouvez-le, absolument, il est à lire  sans limite d’âge.

(D’ailleurs, comme de nombreux livres d’anne Pierjean destinés à la jeunesse, celui-ci est davantage, à mon avis, à donner à lire aux adultes !) 

Edito d’avril 2024

L’édito d’Anne

Quel son de cloche retenir…? Dans Anne des Collines, ses mémoires, Anne Pierjean évoque le décès de son père un vendredi saint, l’année de ses huit ans… et les flonflons de la fête du lundi de Pâques qui suivait…  la catastrophe d’un deuil mêlé à la liesse d’un village dans la ferveur d’une résurrection sacrée… et celle du père, espérée à l’identique, qui ne viendrait pas.

Dans son histoire, aussi, surgissent les souvenirs de sa mère Louise, dont la mère, divorcée, disait que les cloches ne sonnaient pas pour elles… exclues des messes et des fêtes religieuses, de la vie du village et tenues à l’exemplarité pour compenser.

Le glas, sinistre, entendu de loin par l’enfant qu’elle était, et le cortège d’obsèques en marche vers le cimetière, scruté depuis le «Blizard », son refuge secret à l’écart du village…

Toute sa vie, écrit Anne Pierjean, les vendredis saints seront vécus depuis ce prisme d’enfance cinglée par l’imprévisible et l’inadmissible de la mort… toute sa vie, la reconstruction et la persistance de l’ombre tutélaire et porteuse d’un village qui a su sa détresse d’enfant et l’a aidée à survivre, à croire en la vie et à redécouvrir la joie possible et son goût du bonheur, fermement plantée et ancré en elle dans sa prime enfance… « Mes parents s’aiment.. et je niche dans cet amour»

Quels sons de cloches faut-il laisser résonner, qui scandent la vie et la mort, l’espérance et l’interdit, la détresse et la fête… ?

Au travers de ses souvenirs et de ses romans, n’y eut-il pas aussi les cloches qui invitaient à la guerre, sonnaient le rassemblement ? Et celles des victoires et des retours ?… des mariages, des baptêmes, des enterrements et des alarmes? Ballants des cloches battant sur tous les plis de la vie tramée par la parole rituelle des hommes en temps (et tant) de religion…

Ce matin de Pâques, je marchais dans une rue, une enfant à la main, quand les cloches ont développé leur chapelet de gloire. Les oeufs étaient cueillis et nous allions faire le gâteau traditionnel… la douceur était au rendez-vous et l’histoire continue.

Après l’AG du 16 mars, la réunion de bureau et le compte-rendu, les dés sont jetés : la lecture d’une nouvelle aux allures de conte, dans le jardin le 30 juin : « Les yeux bleu barbeau »,

une lecture-balade avec pique-nique à la bibliothèque de St Avit le 6 juillet, découverte du village et rencontre-échange de lecteurs de tous âges , puis le forum des associations début septembre et une farandole de mots d’Anne Pierjean fin septembre.

Des dates à affiner, des lieux à confirmer, des textes à choisir pour St Avit et pour la farandole des mots, des rencontres avec le service de la culture, le foyer Louise Vallon, l’école Anne Pierjean… construire des projets !

Les librairies prenant peu de livres en dépôt, gardez en mémoire que le recueil « si je regarde par-dessus l’épaule de ma vie » est accessible au siège de l’association: 15€, C’est un cadeau apprécié par ceux qui le reçoivent!

Contact : annegrangeon@gmail.com ou au 06 08 15 64 05 ( laisser un message avec vos coordonnées).

À bientôt


Edito de Mars 2024

Prélude au printemps… L’humeur du moment est vagabonde, constructive, active, occupée à préparer l’A.G., à faire des bilans, des projets, à vivre intensément ce qui s’est transmis et se poursuit, tricoté d’émotions : l’association, la maison, le jardin, les livres, pensées et mots, puissants, en partage…

Les ponts lancés sur le temps, d’hier à maintenant, à demain, c’est, parfois, comme la douceur d’un châle inattendu posé sur nos épaules qui, d’un coup, se trouvent contenues, réchauffées. Alors, les ombres portées de tout ce qui nous habite et nous lie s’amplifient, s’animent, nous ré-ancrent dans la vie.

« Dans trente ans, vous me répondrez en regardant des fleurs, en contemplant le ciel, et vous me convierez, par un souvenir conservé, à la chaleur de la minute… »

Clairvoyance, confiance, assurance… Ces mots de 30 ans, d’Anne Pierjean, touchent juste : à chaque printemps, mon regard répond en rencontrant les touffes de perce-neige, primevères et violettes obstinées, jonquilles écarquillées, en repérant les feuilles pointues des tulipes et les tiges rouges des pivoines qui percent la terre, en s’émouvant des jacinthes et des cyclamens qui, devenus sauvages, continuent d’habiter le pré.

Dialogue par-delà le temps.
Oui, « ensemencer » est un bien joli mot… porteur de vie, de promesses, de durée, de souffle. Un mot à dépasser le temps.

Notre AG, « ordinaire » comme le dit la tradition, se tiendra le 16 mars à La Bastelle , à 14H.
Pour nous, c’est un rendez-vous d’amitié et de souvenir, de considération et d’admiration (il faut oser le mot) pour tout ce qu’Anne Pierjean  nous a laissé, inscrit dans le temps, à savourer encore.

Si vous êtes libre, venez :
Au-delà de la réunion qui fera le point de l’année écoulée et introduira concertation et discussion, nous partagerons un moment de lecture surprise, puis le verre de l’amitié.

Le 24 mars à 18H : prochaine rendez-vous de La Bastelle. Pensez aux lectures que vous aimeriez  partager.

A bientôt
anne

Edito de février 2024

La vie en a décidé ainsi, cet édito est un adieu à Roger que nous venons d’accompagner dans ses derniers pas…

Bouleversée d’apprendre son décès le 22 janvier par Maryse, sa femme, et très émue,  je reviens  de la cérémonie d’obsèques où tant d’amis étaient venus témoigner… une foule d’amis autour de sa famille… j’écris sa présence continuée.

Roger et Maryse Amblard m’ont aidée spontanément à créer les fondations de l’association Anne Pierjean, les mots et le jardin, en tant que Trésorier et secrétaire, en 2017. 

Roger aimait profondément son village d’enfance, St Avit, et était intimement concerné par l’hommage rendu à Anne Pierjean, qui, comme lui, était née à Chateauneuf de Galaure et avait passé son enfance à St Avit. 

Il m’avait retracé la géographie et le plan des lieux en nommant les habitants de chaque  maison du village à l’époque de leurs enfances, avait créé le site et le gérait, bien qu’il ait cédé la place à un nouveau trésorier (et Maryse à une nouvelle secrétaire, appelés tous deux par leurs autres nombreuses occupations).

Ils m’ont encouragée, et très activement mis le pied à l’étrier, dès le jour où venant répondre aux questions de l’Université Populaire qui rendait hommage à l’oeuvre d’Anne Pierjean, j’avais évoqué le projet de lancer une association pour faire écho à son écriture : « nous serons là pour t’aider » et, quelques temps après, ils l’ont été, avec efficacité et pertinence.

(on trouve sur le site le texte de « la ferveur d’écrire »,  module présenté par Elisabeth Voreppe à l’UPVD, en 2015 je crois…)

Le site de l’association porte la « marque » de Roger, le portail en est illustré par ses photos, et il en a créé la structure, les pages, l’arborescence… 

La ligne des trois becs reste, pour moi,  indestructiblement attachée à la vue que j’ai découverte depuis la maison de Maryse et Roger, où je suis allée « travailler » avec eux pour peaufiner les pages du site, les statuts de l’association, ses projets. Ligne claire, présente  et lumineuse, liée à Roger.

Roger et Maryse ont étroitement participé à nos premières actions, réunions à La Bastelle, lectures publiques, rencontres à la bibliothèque de St Avit et sont restés solidaires et actifs après avoir cédé leurs fonctions. Le site a été géré par Roger jusqu’à aujourd’hui, il me déchargeait de tout l’aspect technique et le mettait à jour régulièrement.

J’étais loin d’imaginer recevoir, lundi, ce message m’informant de son décès… loin de penser qu’il venait de gravir, ces dernières semaines, sa « sente terminière », et que ses proches devaient, là, au bout de ses derniers pas dans cette vie, lâcher sa main…

« Doucement, disait Paul quand la montée se faisait rude. Arrêtons-nos un peu  : il faut savoir prendre la mesure du souffle… Profitons-en pour admirer : nous ne reviendrons pas par là ».

Cette phrase inscrite en exergue du recueil d’Anne Pierjean, La sente terminière, me parle du bois de Suze, de St Avit qui lui fait face, de Roger et de nos familles qui se sont côtoyées dans ces collines et au-delà puisque nous avons retrouvé, ici, à Crest, nos souffles pour continuer…

Maryse aussi est de ces Collines et je les associe étroitement tous deux à ce chemin de mémoire et de transmission respectueuse, presque tactile, d’une terre et de son histoire.

Nous avons à plusieurs reprises égrené les souvenirs, souvent rieurs et toujours très vifs et émouvants, de ces ancêtres qui nous ont mis sur la voie de nos vies. (Le film « mémoires vives en Drôme des collines », qui figure sur le site, en témoigne)

Alors, aujourd’hui, pendant que la cérémonie des adieux se poursuit en Drôme des Collines, c’est un merci que j’ai envie d’inscrire pour jalonner cette route nouvelle que prennent nos vies… car à chaque départ, notre route s’infléchit, inéluctablement… « nous ne repasserons pas par là »…

Un merci pour cette présence efficace et dévouée, pour l’amitié et pour la continuité, le soutien et la confiance donnée.

j’aimerais insérer une photo … et voilà que je ne sais pas faire… c’était Roger qui prenait le relai pour cet aspect des éditos… Son absence s’inscrit dans notre histoire… Absence-présence vive qui nous accompagnera (écrit le 26 janvier).

La vie qui continue m’appelle à évoquer brièvement l’actualité de l’association : l’AG s’organise, réunions préparatoires et réflexions actives. Comme l’an dernier, elle devrait se dérouler par courrier pour recueillir le maximum de votes, et en présentiel, pour le plaisir de se rencontrer et de partager des textes car elle sera accompagnée d’une lecture. Elle se tiendra à La Bastelle.

La date n’est pas encore définitivement fixée :  ce sera  fin mars, compte-tenu des contraintes diverses.

…..

          

une petite modification dans notre actualité : La réunion habituelle de La Bastelle, qui a lieu le 21, tous les deux mois, sera exceptionnellement reportée au lendemain 22 Janvier… et cela  pour une excellente raison : La bibliothèque de St Avit a prévu un hommage à Anne Pierjean, à l’occasion de la nuit de la lecture.

Pour ce que j’en sais, des lectures seront faites par des enfants et une petite exposition est prévue.

Cet hommage aura lieu le 21 à 17 Heures à la Bibliothèque Anne Pierjean-Robert, à St Avit, et je tiens à y être présente. 

Rendez-vous donc le 22 janvier à La Bastelle, à 18 H ! nous partagerons, comme de coutume, les lectures d’Anne Pierjean que nous aurons aimées, croisées, rencontrées ou relues ces derniers temps et, bien sûr, quelques gourmandises !

2O24
Edito de Janvier 

Derniers jours de décembre, marche concentrée vers la fin de l’année, quelques pas encore et cette année sera close…. c’est toujours un peu inquiétant de clore comme inquiétant de changer… alors une brève, faite de sensations, d’impulsions et d’élans de vie, en perspective des pas suivants :
Qu’elle soit éveillée et consciente, pleine et sereine, curieuse, attentive et respectueuse, lucide et toutefois rêveuse, fiévreuse, critique, notre façon d’être au monde, à la vie, à l’autre. 

A entendre la musique d’une langue que je ne comprends pas assez pour être distraite de sa mélodie, je prends toute la mesure de cette nécessité impérieuse d’échange qui nous lie, nous fonde et nous nourrit.

Résonance, écoute, accueil, réponses, ajustement,  sont des vibratos essentiels que l’on perçoit bien lorsqu’on est privé de l’expression et de la compréhension instantanées, immédiates, données, évidentes et gratuites… Tout en nous se mobilise pour ne pas rester isolé, seul.

Entendre et se faire entendre.
Partager.

Pensées, alors, pour ceux qui, en exil ou en guerre, vivent cette suspension forcée et ce renvoi en soi, non choisi.  Le mur de l’autre quand il est hostile … 

Rien de cela ici, bien sûr.
Une des phrases de chinois que j’ai le plus pratiquées depuis le début de mon séjour a été « j’entends mais je ne comprends pas », selon l’expression consacrée et que j’ai aimé apprendre  :
un distinguo, une précision, parfaitement justes et utiles dans la communication, qui maintiennent le lien actif et vivant : « j’entends » (oui, oui, je suis bien là, j’entends, je perçois) mais je ne connais pas le sens… Atténuée, la négation ne tient pas toute la place et, de part et d’autre,  on cherche immédiatement une solution pour passer le barrage !

Parler, laisser couler ce que l’on entend, ressent, articulé en mots, transmettre ce que l’on demande, ce que l’on est, et sentir que l’on est compris est un privilège fabuleux, de l’ordre simple de la joie, qui porte loin.

Sans lien direct,  une phrase lue ces derniers jours, résonne pourtant (in Paris-Beyrouth de Jacques Weber) : « aujourd’hui Jocelyne m’a demandé de choisir un texte à dire sur la scène d’un théâtre où nous devons tourner. Les jours s’accumulent, la guerre désenchante tout. Plus que jamais j’ai choisi Beckett et l’Innommable, où l’homme ne sait pas ce qu’il attend, et attend de savoir qu’il ne sait plus. »
Je laisse en suspens… 

Une fin et un début d’année qui nous poussent vers le désenchantement mais nous invite d’autant plus à la foi en l’humain et ses capacités à entendre… 

Edito de décembre

Je vois de loin arriver décembre, les oiseaux chantent dans les manguiers du jardin et un enfant joue dans la maison d’à côté. Des mots que j’entends et ne comprends pas, des sons inhabituels, le soleil s’apprête à passer derrière les montagnes, il est 16H18… dans une heure il fera nuit noire, en cela je me rapproche des sensations des décembre que je connais … en cela seulement, car il fait chaud et j’ai jardiné ce matin comme nous le faisons au début de l’été, du temps qu’il fait encore frais.

L’énergie de tenter de comprendre et de parler m’enveloppe dans une bulle, j’en arrive à chercher les mots d’anglais les plus courants quand je tente de m’exprimer par défaut ! … ce que je n’ai pas envie de m’accorder, d’ailleurs ! je préfère feuilleter intérieurement mes capacités en chinois et je conclus souvent que « je ne sais pas dire » ou je bredouille des mots approximatifs, on m’aide, ou pas, on me parle, je comprends encore moins, on sort le portable pour utiliser le traducteur… et je n’aime pas cet anglais qui tombe et, solutionnant informatiquement la phrase, m’empêche d’apprendre !

Mon dictionnaire et mon traducteur internet m’accompagnent quand même, au-cas-où il y aurait une nécessité urgente de se faire comprendre !  mais j’essaie de trouver les formules simples avec mon pauvre vocabulaire … quand j’y arrive c’est souvent en pure perte car ma prononciation n‘est pas à la hauteur des phrases qui sont peut-être, parfois, relativement correctes grammaticalement ! alors, toujours … sourires, saluts, renoncements, gestes et indulgence : on s’assure de savoir de quel pays je viens, on hoche la tête avec sympathie à l’évocation de la France.
Il faut dire que dans cette province du sud de Taïwan, on parle davantage taïwanais que mandarin.
Le lendemain, on me reconnaît et on me salue.

Ce village, dont le nom signifie « porte de l’eau » est à dimension humaine, traversé par une rivière qui galope et actionne une roue à eau, rencontre des vannes et file droit vers un lit caillouteux, infiniment large pour la recevoir… elle s’y perd en zig-zag mais sa vallée passe sous de longs ponts suspendus que j’irai traverser pour le plaisir du mouvement. En perspective, on en voit plusieurs et, au-delà des ponts, on me dit qu’il y a des villages traditionnels qu’on visite. Les aborigènes, premiers habitants de l’île, habitent dans de nouveaux villages, construits pour eux, sur les hauteurs de Shuimen, maisons au carré, jolis jardins, rues désertes croisées perpendiculairement, avec application…
Ils tiennent souvent les magasins à Shuimen et sans doute beaucoup travaillent dans les villes alentours.

Mes promenades m’ont conduite entre des maisons bordées de plantes, plus souvent plantées dans des pots ou des bacs  alignésqu’en pleine terre. Chaque maison, ou presque, a sa vasque remplie, ou son bidon coupé, où s’épanouissent des lotus. Aux grilles sont accrochées des orchidées, aux arbres des plantes parasites ou épiphytes, je circule entre les manguiers et autres champs d’arbres fruitiers inconnus, des plantes vertes sur-dimensionnées, de celles qu’on installe dans nos salons (en tout petit !) ou dans nos jardins, l’été, pour les rentrer soigneusement l’hiver.

Les routes sont essentiellement fréquentées par des scooteurs, quelques voitures et des bus. Peu de place pour les piétons, les marcheurs (je devrais dire la marcheuse que je suis car il y en a très peu) se glissent dans une bande très étroite, entre une ligne blanche et l’herbe, la largeur des hanches, pas plus !
D’ailleurs, on m’a vite repérée et on m’a proposé un vélo, je roule maintenant plus souvent que je ne marche dans la voie cyclable !

Dans la maison, l’influence japonaise se mélange aux habitudes de campagne et de pays tropicaux : dans le bac à douche, un petit tabouret de bois, bas, des bassines et une casserole suspendue invitent à s’asseoir et à faire ses ablutions avec le même soin que nos anciens, sans laisser le pommeau de douche couler à flot. Le confort est là, l’eau est chaude, recueillie dans de grands réservoirs qui surplombent les maisons et j’ai eu plaisir à découvrir ces gestes vus dans des films…

Les chambres ont un plancher légèrement sur-élevé, on glisse ses chaussures d’intérieur dessous, les chaussures d’extérieur ont déjà été déposées à l’entrée, et des matelas très fins sont posés à même le sol.
Dans certaines boutiques, en ville, on pose aussi ses chaussures, avant d’entrer, sur des étagères prévues pour ça, et on enfile des claquettes.

La nourriture est partout, toute prête, odorante, offerte par des étals variés, dans des gargottes au bord des rues, ou de minuscules restaurants populaires… On y mange à la chinoise, à la japonnaise, à la taïwanaïse je suppose, des fritures, des bentos, des bao (pains cuits à la vapeur et fourrés à la viande), des raviolis, du riz sauté, et tous les morceaux de viande les plus étonnants, pattes de poulet, pieds et couenne de cochon, lard frit, croupions, foie, cœurs, crêtes, tripes…
De bonne heure, la vie s’éveille ostensiblement vers 6 H du matin, ces étals sont très fréquentés, on fait la queue pour s’acheter un petit déj taïwanais typique, omelettes aux herbes, galettes feuilletées, cuites sur de grandes plaques, bao, sandwiches, hamburgers taïwanais, nouilles, galettes… l’abondance, seulement du salé, et un grand verre de café au lait de soja, généralement froid. J’ai vite compris que ce qu’on appelle café n’est pas du café mais en a la couleur !

La cuisine de la maison que j’occupe est équipée de l’essentiel : une bouilloire pour purifier l’eau, un frigo et un cuiseur de riz, peu de vaisselle et peu d’ustensiles, apparemment on n’y cuisine guère. La coutume et la facilité sont d’acheter un plat dans la rue, voire d’y manger, rapidement.
Les voisins, pourtant, m’ont invitée, le premier soir, à boire un verre avec des plats maison et m’ont apporté, hier, un grand bol d’une soupe fameuse, … ils m’ont aussi déposé des gâteaux l’après-midi (chauds, achetés en ville), des fruits, en guise d’accueil.
Et les offrandes se renouvellent !

On trouve toutefois quelques  marchands de légumes, de viande crue, de fruits. Je vais m’acheter un panier local et faire mes courses, cuisiner aussi !

La débauche d’emballages surprend et choque les européens que nous sommes, sacs plastiques à profusion, pour le moindre achat, multiplication effrénée des emballages individuels… que l’on retrouve au bord des rues et partout, malheureusement, comme les mégots de cigarette et les canettes de boissons.

Le temps que j’écrive, la nuit s’installe. 17H22.
Le ciel est orangé doux. Les moustiquaires confortables, à toutes les portes et fenêtres, protègent la soirée si on prends soin de ne pas laisser la prote ouverte trop longtemps! quelques géko veillent…

Une nuit douce avance, tiédeur agréable, les coqs s’entrainent déjà, les chiens sont calmes, ils parleront plus tard… il y en a beaucoup alentours, attachés, quelques-uns circulent tranquillement ou dorment étalés à l’ombre. Ceux du voisinage ne me disent déjà plus rien quand je passe, ils ont compris, je suis du lieu.

J’entends le balai qu’on passe dans la cour d’à côté, quelques bribes de phrases échangées.
Les familles mangent tôt.

Cette première fois où je m’échappe en novembre a une saveur subtile d’été prolongé et la légère tension sous-jacente d’un petit challenge. Je me laisse glisser dans un temps inconnu… les mots et expressions me viennent peu à peu. la Joie domine.

Une balade en terre inconnue a commencé un matin tôt, avant la chaleur, vers le « taÏwan indigenous People Culture Park » (cette fois c’était aussi écrit en anglais) : un immense pont suspendu à traverser, puis l’entrée du parc, encore désert. Le pont suspendu très haut au-dessus de la rivière, ne balance pas, fermement arrimé, petite déception après une légère appréhension! Un ancien pont est au-dessous, bien en-dessous, condamné.
Les deux autres ponts suspendus que j’ai traversés ensuite, plus anciens, moins grandioses, ne balançaient pas non plus mais, étroits et surplombant une forêt luxuriante où on devine à peine une rivière, ils étaient plein de charme. De ceux-là, on était au niveau du sommet des arbres, parfois fleuris de grandes fleurs roses … la forêt embaumait par endroits, j’y ai trouvé ensuite les maisons traditionnelles recomposées ou des ruines, et les cigales (sans doute quelque insecte de ce genre ?) ne se taisaient même pas à mon passage.

Pour la première fois, je vous envoie un édito lointain, décalé, désynchronisé des préparatifs de fête et des frimas, en marche vers ces nouvelles et ultimes « premières fois » à vivre, peut-être vers un nouveau souffle, en dégustant les jours, heure par heure, et un certain déphasage…
J’ai mis deux jours à réaliser que ces interjections que j’entendais de temps en temps devant ma porte ou dans le jardin, comme des cris un peu furieux, c’était mon prénom…  « Anna »… !
A chacune de mes sorties, les têtes s’inclinent et je reçois des sourires, comme dans toutes les campagnes et les montagnes du monde, peut-être … ?

Pas de citation d’Anne Pierjean, cette fois ses pas n’auront pas précédé les miens, terra incognita … ce sont, à l’inverse,  les pas de mes enfants  et de ma petite fille qui m’auront précédée et invitée… 

Anne

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Nouvelles du livre hommage

Le livre « si je regarde par-dessus l’épaule de ma vie… » a été envoyé à ceux qui le souhaitaient, une pile d’exemplaires attend ceux qui viendront le chercher, et, bien sûr, si vous n’aviez pas prévu avant, il suffit de vous manifester pour en demander un !


Les premiers exemplaires ont été expédiés samedi à  ceux qui avaient souscrit et je mets à disposition les exemplaires retenus, au siège de l’association.

   

Bien sûr, il y en aura aussi pour ceux qui n’ont pas réservé ! 
Contactez-moi pour les retirer ou venir en acheter!
tel : 06 08 15 64 05 ou mail : annegrangeon@gmail.com

Précision pour les envois internationaux, des amis lecteurs belges me l’ont demandé qui, par ailleurs, n’ont plus de chèques depuis longtemps ! (pardon pour ma méconnaissance !) :
la pré-commande (souscription) peut se faire par virement international U.E. (à demander à leur banque en fournissant le Rib de l’association) et les frais d’envoi sont de 7,50 € jusqu’à un envoi de 500 gr (c’est-à-dire jusqu’au poids de 3 livres!)

Comment contribuer par souscription (cliquer ci-dessous pour agrandir)

 

 

Voici le RIB du compte de l’association au Crédit Mutuel ,
à CREST (26400) :

ANNE PIERJEAN, LES MOTS ET LE JARDIN
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Elle a eu beaucoup de correspondants, d’amis de rencontres littéraires, alors rassemblons les mots écrits, les témoignages, comme une vaste mosaïque

 

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Je voudrais qu’à me lire on n’entende qu’une voix parmi d’autres essayant de murmurer le plus grand nombre… si bien que chacun pût faire sien les mots qu’un seul d’entre eux aurait ruminé, parce qu’il était fait comme cela peut-être ? ou que les donnes de sa vie eurent besoin de dire pour survivre ?

alors, les mots épars l’enveloppèrent en nuées et il tenta à cru, à vif, et dans l’urgence, d’en discipliner l’essaim fou ? en tous cas de l’apprivoiser jusqu’à cet instant salvateur ou suzeraineté et allégeance se confondent — et ce ne saurait être  ni question de talent ni question de génie mais d’écorces tombées jusqu’à l’aubier ouvert, jusqu’à l’impalpable sève captée que chacun transcendera à sa mesure.

J’aurai toute ma vie dit cela inlassablement en tous mots et en toutes phrases : la source des sources est à tous et il faut parfois que quelqu’un puise pour réveiller des soifs qui restaient en besoin tout au fond de l’obscur de soi   — et le seau n’est rien dans l’affaire qu’une poignée de main humaine.
Anne Pierjean, extrait de lettre à Raoul Dubois, 2001

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